Quel contrat entre le média et le lecteur ?

UNE DEUXIÈME VAGUE DE LA TRANSFORMATION MÉDIA EST NÉCESSAIRE POUR ANTICIPER LES TENDANCES.

Les médias ont récemment changé d’ère. Nous avons d’abord connu une première longue phase de transformation, entamée à l’orée des années 2000, durant laquelle chaque groupe a développé « à son rythme » des offres digitales. En parallèle, l’économie s’est « plateformisée » et les contenus sont devenus le carburant – ou le produit d’appel – des plateformes : la presse ou la musique pour les opérateurs téléphoniques, les séries pour les e-commerçants… Mais ce double modèle ne résout que (très) partiellement la crise dans laquelle a été précipitée l’industrie. Une deuxième transformation des médias est désormais nécessaire pour reconstruire une nouvelle logique. Désormais, l’objectif est de rebâtir des business model viables.

Cette deuxième vague de la transformation peut se faire en 4 étapes. Tout d’abord, il faut redéfinir intégralement la proposition de valeur des marques média et « nettoyer » l’expérience client. La question n’est plus de savoir si les dérives publicitaires étaient évitables, mais de repenser intégralement le rôle de la publicité dans l’expérience des utilisateurs. Cela signifie réduire la voilure, retravailler les formats, donner des gages clairs aux consommateurs, réfléchir à ce qui fait la valeur intrinsèque des contenus face à la multiplication des contenants. En somme, redéfinir le contrat entre média et lecteurs : suis-je un média à vocation grand public et gratuite ? Un média de pointe dont le travail ne peut être garanti que par les abonnements payants ? Un média de niche dont la valeur provient de sa communauté ? Quel que soit le contrat, ses termes doivent être pleinement assumés et partagés entre toutes les parties.

Ce contrat redéfini, les médias peuvent ensuite réintermédier les données et l’expérience de leurs consommateurs au lieu de les laisser aux acteurs tiers comme les Gafa. Cela passe par la création de paywalls et, ou logins uniques auxquels il pourrait devenir obligatoire de s’inscrire à terme. C’est la clef pour fournir des contenus et une expérience sur mesure aux consommateurs tout en offrant des produits publicitaires compétitifs aux annonceurs.

Une troisième étape consiste ensuite à explorer sans relâche de nouveaux territoires d’expression et de business. Comme l’industrie automobile a investi massivement pour ne pas se laisser dépasser par les Gafa, les médias sont condamnés à investir pour anticiper les tendances : content recommandation, visual search, instant translation, développement des interfaces conversationnelles. Ils doivent créer des formats toujours plus intégrés comme le font les géants numériques à destination des agences.

Enfin, la plupart des médias auront intérêt à multiplier les sources de revenus tierces afin que leur cœur de métier – l’information indépendante – soit de moins en moins exposé aux aléas du marché. Certains ont déjà misé sur le consulting (Bloomberg), la création de logiciels (Washington Post) ou le e-commerce (Hypebeast). Demain, on pourrait imaginer des médias devenus leaders des MOOC (Massive open online course) ou du conseil marketing.

YVES SIMEON – Dirige RELOAD

Cabinet de conseil et de formation. Accompagne les entreprises dans la mise en place de parcours de (trans) formation. Yves intervient tous les mois dans la rubrique Mot pour Mot
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@SimeonYves

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