La voiture prend l’ère numérique

Les constructeurs ne doivent pas repenser uniquement leur coeur de métier, mais aller explorer le jardin du voisin, quitte à en annexer une partie. Explications.

La démocratisation des technologies dans les voitures est le signe d’une industrie aussi novatrice qu’inquiète. En effet, les constructeurs sont lancés dans une course contre la montre avec Google, Tesla, Apple ou Uber pour tirer parti d’un marché en mutation, marqué par la baisse des usages, le recul de la propriété, la montée des exigences écologiques.
Si la révolution numérique bouleverse autant d’économies, c’est qu’elle estompe les frontières entre secteurs et abaisse les barrières à l’entrée. Tesla constitue à cet égard un exemple parfait. Fondée il y a 13 ans, cette société ne détient que 0,02 % de part de marché dans le monde. Son succès retentissant repose sur un développement moins coûteux qu’avant et sur la promesse d’un produit allant plus loin qu’une simple voiture électrique. à l’ère numérique, il ne faut jamais s’interdire d’explorer le jardin du voisin – quitte à en annexer une partie.

Les grands noms de l’automobile doivent réaffirmer leur leadership. Comment ? En s’appuyant sur un savoir-faire technologique en constante expansion ainsi que sur certains actifs précieux. J’en distingue quatre à valoriser pour se réinventer : faisons ici un exercice de « design fiction » pour imaginer de nouveaux produits ou services construits sur ces actifs !

Si l’on s’appuie sur la présence physique, les possibilités sont immenses. Les constructeurs pourraient s’inventer fournisseurs d’accès à Internet en transformant chacune de leur voiture en relai mouvant connecté à un satellite. Cela permettrait de couvrir des zones en- core isolées. On pourrait aussi utiliser tous les capteurs des véhicules pour créer un service de cartographie mis à jour en temps réel par des millions de voitures en déplacement.

Les communautés de marques sont aussi des actifs importants. Pourquoi ne pas s’adresser à ces fans en déployant ces marques au-delà de l’automobile ? Créer une chaîne de télévision Dacia dédiée au « smart living », une gamme de vêtements outdoor premium Land Rover ou des smartphones Mini… Volkswagen pourrait imaginer un réseau d’entraide permettant aux adhérents de contourner les sociétés d’assistance et les garagistes en cas de panne. Pendant des décennies, les constructeurs ont cumulé des données sur leurs clients. Pourquoi ne pas transformer chaque véhicule comme outil d’agrégation de data pour étudier les flux ? Cela permettrait d’améliorer la circulation en ville, la disponibilité de certains services. Ces données anonymes pourraient aussi être vendues aux assureurs pour étudier les comportements à risque ainsi qu’aux fabricants de voitures autonomes pour améliorer leur comportement face aux conducteurs humains !

Les données pourraient enfin être utilisées pour tirer parti des nombreux écrans de nos voitures. Recroisées avec d’autres informations (géolocalisation historique d’achats en ligne…), elles aideraient les annonceurs à proposer des contenus sur mesure dans la voiture et même en dehors, sur les panneaux d’affichage digitaux par exemple.

La question pour les constructeurs n’est plus « comment défendre le marché automobile ? », mais « quels seront leurs marchés demain ? ». Les hommes du marketing doivent rester customer-centric plutôt que product-centric. Plus que jamais, une marque n’est pas un champ industriel figé mais un champ transactionnel, conversationnel en expansion, où l’on ne doit rien s’interdire.

YVES SIMEON – Dirige RELOAD

Cabinet de conseil et de formation. Accompagne les entreprises dans la mise en place de parcours de (trans) formation. Yves intervient tous les mois dans la rubrique Mot pour Mot
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@SimeonYves

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