De l’art subtil de l’intégration

La clé est de multiplier les contacts, mais en les encadrant fortement. conseils.

Publicis Groupe s’est mis à l’heure du « Power of One » dès la fin 2015 et depuis tous les groupes ont suivi. Ogilvy s’est transformé au prisme d’une marque unique en début d’année tandis qu’Havas a réuni média et créa en mars. Ce qui est nouveau ici, c’est le volontarisme presque fiévreux des grands acteurs à unifier rapidement leur organisation à l’échelle mondiale.

Les raisons d’une telle mue sont simples. Côté annonceurs, maintenir des silos est aussi inefficace que coûteux. Les agences, quant à elles, voient dans l’approche « one stop shop » la seule manière de sécuriser du business et préserver des marges. Sans oublier la nécessité pour tout le monde de tenir tête à des géants numériques… Mais la transformation n’est pas chose aisée. Il y a 15 ans, un modèle d’agence spécialisé dans l’intégration marketing, (Naked ou Reload), s’est heurté à la difficulté de financer l’activité d’intégration. Comment réussir cette fois-ci ?

Au risque de vous étonner, je dirais que plus la transformation est grande, plus il nous faut revenir aux fondamentaux. Cela veut tout d’abord dire que les silos ont des vertus, pour qui sait les manier ! Les tenants de l’intégration rêvent d’une organisation où tout le monde réfléchit en même temps aux mêmes choses, c’est illusoire. En effet, les temps de la création, de la data ou des médias sont très différents ce qui conduit à des incompréhensions. Si tous les métiers doivent dialoguer le plus tôt et le plus souvent possible, chacun doit aussi pouvoir travailler de son côté. La clé de l’intégration, c’est de multiplier les contacts mais de les encadrer fortement.

Ce qui nous amène à un autre point : travailler « en mode projet » c’est bien… mais s’il y a un chef de projet. La véritable intégration marketing ne peut se faire qu’à travers une vision claire et unique portée par une seule personne. Quand bien même l’intégration fait intervenir de nombreux pontes dans chaque discipline, la décision finale sur l’ensemble de la chaîne de valeur doit revenir à un seul responsable, qui peut être désigné parmi les agences. Idéalement, il faudrait même créer des rôles de coordinateurs à temps plein.

Les groupes de communication ne sont pas les seuls à devoir repenser leurs modes de travail. Même une agence parfaitement intégrée ne peut rien face à un client encore siloïsé. C’est pourquoi les annonceurs doivent prendre leurs responsabilités et adapter leur structures internes à ce nouveau paradigme. Cela signifie unifier certains services ou réduire drastiquement le nombre de décisionnaires pour des raisons de cohérence. Il y a là un enjeu de culture unique à construire aussi bien au sein des groupes de com que des marques.

Cette culture doit reposer sur trois choses. Tout d’abord, sur un langage commun. Des termes partagés par tous, une même définition des concepts. Ensuite, sur du pragmatisme. Une bonne intégration ne peut se faire que dans une dialectique permanente entre les différents corps de métiers, que ce soit chez l’agence ou l’annonceur. Une approche itérative qui doit autoriser plus d’expérimentation et de prise de risque. Enfin, sur une certaine forme de réalisme voire d’humilité. En effet, la véritable intégration prendra du temps et exigera un accompagnement : former les équipes, travailler les automatismes. Il n’existe pas de modèle unique et absolu, si ce n’est celui qui correspond à votre agence ou votre marque. Une chose est certaine : l’intégration ne s’improvise pas elle doit être abordée comme un projet industriel global qui doit être formalisé et partagé par tous !

YVES SIMEON – Dirige RELOAD

Cabinet de conseil et de formation. Accompagne les entreprises dans la mise en place de parcours de (trans) formation. Yves intervient tous les mois dans la rubrique Mot pour Mot
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@SimeonYves

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