Assumer la publicité

Comment remettre à plat le contrat de lecture et le pacte publicitaire qui en découle. Exemples.

Repenser la place allouée à la publicité est un serpent de mer qui revient à chaque crise. Il n’y a pas eu de réflexion globale car en fait les médias ne sont pas égaux devant la publicité, et il y a d’importantes disparités d’un média à l’autre. On sait que chaque média possède son « contrat de lecture » avec son public. De ce contrat de lecture unique découle un modèle publicitaire propre.

Par exemple, en presse, la pub fait partie du média. La « September issue » de « Vogue » tire autant sa valeur de ses articles que de ses 400 pages de pub. De même, j’ai déjà eu l’occasion de conduire des études où des lectrices de « Marie-Claire » se plaignaient du manque de prise en main de leur magazine s’il ne contenait pas assez de double-pages ! En radio, la publicité est impossible à éviter et peut sembler invasive. L’importance du«contrat de lecture»entre l’auditeur et la station est d’autant plus prégnante. C’est la raison pour laquelle la récente ouverture à la publicité commerciale de Radio France a conduit à une forte crispation du public. Malgré les conditions draconiennes de France Inter, beaucoup y ont vu une rupture du contrat historique. En TV, les écrans de huit minutes entourant certains programmes stars étaient tolérés car ils intégraient le fait que les téléspectateurs font quelque chose en parallèle. Mais que se passera-t-il si l’on peut les bloquer d’une pression de bouton ?

Un début de solution peut être entrevu chez des pure players comme Melty, Buzzfeed ou Vice, qui incorporent les contenus de marques afin de créer l’expérience de lecture la plus fluide et cohérente possible. Mais si la tentation serait de tout transformer en native advertising, cela serait techniquement impossible, voire contre-productif. Il est inutile de « maquiller » la publicité : il faut l’assumer pour ce qu’elle est, et veiller à la rendre acceptable par tous.

Pour tous les médias, historiques comme émergents, technologiquement exposés ou non, il est primordial de remettre à plat son « contrat de lecture » et le « pacte publicitaire » qui en découle. Comment ? En faisant un travail tripartite où l’intérêt de chacun – public, média et annonceur – doit être pris en compte.

Par exemple, Snapchat possède des conditions éditoriales strictes et forme les annonceurs afin de garantir la cohérence des messages diffusés. Leur système de filtres sponsorisés est un bon exemple de contenu de marque bénéficiant à toutes les parties. De même, le groupe media norvégien Schibsted a récemment conduit une grande étude auprès de 37 000 lecteurs afin de déterminer de manière collégiale les limites de l’acceptabilité de la publicité, notamment sur mobile.
Par ailleurs le pacte publicitaire peut être renforcé en intégrant le fait que le média est pour le lecteur autant un vecteur d’information que d’appartenance. à ce titre, l’exemple de « Monocle », qui a développé avec succès une webradio où les sponsors sont particulièrement intégrés à des contenus très pointus, est intéressant.

Dans cette refonte du pacte publicitaire, la technologie pourrait jouer un grand rôle. On pourrait créer une nouvelle typologie de publicités basée à la fois sur le contrat de lecture, la nature du message (divertissement, marketing direct…) et le profil du lecteur. Une typologie qui pourrait alors évoluer en temps réel grâce à l’analyse des données de chaque individu. Le message serait ainsi adapté en fonction de l’attitude de la cible par rapport à la pub afin d’être le plus acceptable possible. Après l’adblocking, l’adliking !

YVES SIMEON – Dirige RELOAD

Cabinet de conseil et de formation. Accompagne les entreprises dans la mise en place de parcours de (trans) formation. Yves intervient tous les mois dans la rubrique Mot pour Mot
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@SimeonYves

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